Benjamin Séguélas : Quand l’occasion fait le larron …

Benjamin, ta saison va se finaliser par une participation avec l’ensemble du groupe de « Solidaires by Esprit Sports » à la Diagonale des Fous, mais peux-tu nous faire partager ton « histoire » dans l’ultra trail et dans le sport en général ?

Benjamin : En ce qui me concerne, je ne suis pas né dans le Béarn. Je suis originaire du Tarn, de Castres. Je suis arrivé ici pour des raisons professionnelles en 2014. Je suis technicien chimiste. Je travaillais chez Pierre Fabre à Gaillac et j’avais trouvé du travail ici sur le Bassin de Lacq.

Dans le Tarn, je courais un peu, sur des courtes distances : des dix bornes, des semis. Je pratiquais le VTT en loisir, avec quelques rares compétitions comme le Roc d’Azur. Je ne me prenais pas la tête avec des questions de préparation. Arrivé ici, j’avais un très bon copain qui pratiquait le triathlon et qui me motivait pour que je vienne avec lui. Mon souci, c’est que je ne savais pas nager … J’ai donc dû apprendre. J’avais du temps libre, je ne connaissais pas grand monde encore, je me suis inscrit à des cours de natation, le soir à la piscine. A 25 ans, j’ai appris à nager. Avant cela, je barbotais, je ne savais pas nager le crawl, je ne savais pas respirer, je partais d’un peu loin ! L’apprentissage du crawl m’était indispensable pour participer à des triathlons.

En 2014, je commence à courir quelques triathlons. Je me sens assez bien dans cette activité encore nouvelle pour moi. L’année suivante, cet ami me dit qu’il avait envie de courir un Iron man. « Ce qui serait top, c’est qu’on le fasse ensemble ! » Oui, mais moi j’ai démarré il y a un an … C’est peut-être un peu court !

Mais nous voilà tous les deux embarqués sur ce projet. Nous nous inscrivons sur l’« Iron man de Barcelone ». C’était assez effrayant ! Je n’avais jamais nagé 4 bornes, je n’avais jamais fait 180 bornes de vélo, je n’avais jamais couru un marathon … J’étais novice sur toutes les disciplines ! Grosse année 2015 pour moi. Je me suis beaucoup préparé. J’ai beaucoup nagé, beaucoup roulé. J’ai fini par avoir une grosse condition physique. Pendant l’été, nous sommes allés voir, à vélo, une étape du Tour de France à la Pierre Saint Martin et en redescendant, une voiture coupe la route de mon copain qui chute lourdement. Bilan : fracture de l’avant-bras et le projet qui s’envole pour lui. Je me retrouve tout seul, moi, le novice qui devait l’accompagner. Je fais cette course et ça s’est super bien passé ! C’était ma première expérience d’épreuve d’endurance sur une journée complète. Puis je me suis licencié à Pau Pyrénées Aventure, c’était intéressant pour moi d’avoir une licence de triathlon et de m’entraîner avec d’autres athlètes.

Je participe ensuite à quelques autres triathlons. Lors de l’assemblée générale de cette association, pour les 40 ans du président, ils évoquent une participation à la « Diagonale des fous ». J’avais un gros capital confiance après avoir vécu l’Iron man, je n’avais jamais fait ce type d’Ultra Trail, je n’avais jamais mis les pieds en montagne … J’ai dit, pourquoi pas. Je me suis greffé au projet.

Nous voilà partis en 2016 pour courir la « Diagonale ». Plusieurs membres de l’association étaient sur ce projet. Je n’avais évidemment pas de point pour accéder au tirage au sort des dossards. Je suis retourné dans le Tarn pour faire le « Black Mountain Trail ». C’est un trail en plein hiver, dans la Montagne Noire, il y avait de la neige … C’était l’enfer. 55 bornes, 3500 m de D+ ; exactement ce qu’il fallait pour prendre les points pour être éligible pour la « Diagonale ». Je suis rentré, j’étais perclus de crampes … Je me suis dit que la « Diagonale » allait être compliquée ! Je m’étais lancé, mais je n’avais aucune expérience et aucun vécu en trail.

De fil en aiguille, nous avons couru de multiples trails avec les copains dans la région, et à la fin de l’année nous partons à la Réunion. C’était une sacrée aventure, je n’avais jamais fait de long, je n’avais jamais couru de cent bornes. Je pense que nous avions dû faire le Tour de l’Aneto, 75 bornes, mais en format rando trail. En course pure, je n’avais jamais couru de telles distances. Des marathons en montagne, mais pas plus. Sur la course, j’étais parti très prudemment, peut-être trop, mais du coup, cela m’avait permis de bien finir.

Cette première expérience à la Réunion était déjà le fruit d’un projet collectif ?

Nous étions 14 à vouloir partir ensemble. Pendant toute la préparation les uns et les autres proposaient des sorties en montagne et moi je me greffais à tout, comme je découvrais un peu cet univers. C’est ce collectif qui nous a portés toute l’année. Seul, je ne me serais jamais embarqué dans cette aventure.

Depuis 2016, j’ai un peu délaissé le triathlon, je n’en cours plus qu’occasionnellement. Maintenant que j’ai goûté à la montagne, j’ai basculé sur le trail. Tous les ans, je fais une course du format entre 100 et 120 kilomètres comme les « Templiers », le « Grand Raid des Pyrénées ».

Dans tes toutes jeunes années, tu étais très sportif ? Il y a un sport que tu as beaucoup pratiqué ?

Pour moi, mon évolution dans ces sports a été liée à des concours de circonstances : accompagner un copain, être porté par un groupe. Mais j’ai quand même toujours couru. Très jeune, j’ai commencé par du sport collectif, du foot, parce que j’étais dans un petit village où c’était le seul sport à pratiquer. C’était pour être avec mes copains. Mais contrairement à Nicolas (Craveiro) qui est passé par un sport étude, moi je n’ai connu que le plus petit niveau amateur. En fait j’aimais bien la préparation physique … mais ballon au pied, je n’étais pas très bon ! Non, ce n’est pas le foot qui m’a amené à une pratique intensive du sport, mais j’ai toujours aimé courir et faire du VTT.

Tu es adepte du multi-activité. Au niveau des distances de tes courses, tu es allé crescendo au fur et à mesure des années ?

J’ai plutôt le sentiment d’avoir attaqué très tôt sur des longues distances. Je ne peux pas parler d’une progression. Pour moi, tout a été lié à des concours de circonstances, un iron man après uniquement une saison de pratique, idem pour la Diagonale. J’ai été porté par le hasard des rencontres avec des gens qui eux en étaient là de leur niveau de pratique.

Pour la saison à venir, on peut parler de progression dans nos courses et dans notre préparation pour préparer à la « Diagonale ». Mais les courses que nous avons cochées sur notre calendrier nous font envie. La notion de plaisir est très forte, très prégnante, il n’y a pas que l’idée de montée en puissance. Pour moi, c’est un peu chaotique … Mais je suis toujours là et j’ai fait plein de choses !

Je pense que j’ai des qualités d’endurance qui me permettent de me frotter à ces niveaux de difficultés. Je ne me blesse pas souvent. Je crois aussi que mes entrainements sont plus structurés maintenant, surtout quand je compare à ce que je faisais à mes débuts ! Jérôme (Mirassou) suit Céline (Bérécochea), ma compagne, pour sa préparation. Je m’inspire de ce qu’il lui propose et si besoin je le questionne.

Nous organisons nos séances souvent ensemble, c’est surtout le cas pour les entraînements en montagne, les blocs vélo. Et puis, ces entraînements, ces sorties sont des moments de plaisirs partagés. Ce que l’on aime bien faire, dès que c’est possible, ce sont de gros week-ends en montagne. Nous partons le vendredi soir pour un retour le dimanche soir. Nous choisissons notre point de chute selon la météo. C’est soit versant français, soit versant espagnol. Le samedi, c’est souvent une grosse bambée en rando-trail et le deuxième jour, c’est plus court, une quinzaine de kilomètres, avec, si possible, un joli sommet. Progressivement, nous avons allongé cette deuxième journée. C’est ludique, mais en même temps cela nous a permis de construire un gros foncier.

Nous préparons nos sorties sur les cartes. Cela nous a permis de découvrir des vallées que nous ne connaissions pas dans les Pyrénées françaises, mais aussi beaucoup en Espagne. Aujourd’hui, nous connaissons pas mal d’endroits sur les deux versants de la chaîne.

Pour les autres séances sur la semaine, cela dépend fortement de nos agendas professionnels. En ce qui me concerne, les entraînements sont assez faciles à positionner en fin de journée, parce que je termine relativement tôt le travail. C’est plus difficile pour Céline.

Nous n’avons pas évoqué tout ce qui concerne l’hygiène de vie ; l’alimentation …

Nous mangeons à notre faim. Nous ne contrôlons pas les quantités. C’est vrai aussi que nous brûlons pas mal de calories ! Nous avons je pense une hygiène alimentaire assez saine, mais elle découle de notre mode de vie. Pour ma part, je dois éviter le gluten et je ne mange pas beaucoup de produits laitiers. Nous privilégions les plats que nous cuisinons, les légumes, notamment l’été avec ceux que nous cultivons dans notre jardin.